France. Après le syndrome de Fachoda, le « complexe de Bangui »

Parti pris · Alors que la diplomatie française s’émancipe à peine du « complexe de Fachoda », qui a longtemps guidé sa stratégie sur le continent africain, la voici soumise à un nouveau syndrome lié à un autre ennemi, la Russie. Ses alliés africains ont bien compris l’intérêt de cette « rente à l’endiguement ».

Vladimir Poutine recevant Emmanuel Macron en février 2022, à Moscou.
© Soazig de La Moissonnière / Présidence de la République

Le 15 décembre 2022, les derniers soldats français présents sur le territoire de la République centrafricaine quittaient Bangui à bord d’un C-130 Hercules, destination Paris. Une page se tournait après plusieurs décennies d’une présence militaire qui a compté, au plus fort de l’opération Sangaris (2013-2016), jusqu’à 1 600 hommes. Un traumatisme et une humiliation pour la France, qui a toujours exercé une tutelle très serrée sur cette ancienne colonie – elle est intervenue, depuis les indépendances, à quatorze reprises dans ce pays1. Et des images susceptibles de conforter un peu plus ce que l’on nommera ici le « complexe de Bangui » : cette nouvelle hantise française pour les ambitions russes en Afrique subsaharienne.

Ce retrait de Centrafrique est en effet l’aboutissement d’un long processus de désengagement contraint, sous la pression du gouvernement de Bangui et de ses nouveaux alliés russes. Ces derniers se sont progressivement imposés dans le pays, depuis les premières livraisons d’armes, en janvier 2018, jusqu’au déploiement d’instructeurs et de forces spéciales du tristement célèbre groupe Wagner. Au printemps 2021, la France décidait de suspendre sa coopération militaire et son aide budgétaire, estimant être la « cible d’une campagne de désinformation massive » téléguidée par la Russie, avec la complicité de Bangui. À la fin de l’été 2022, elle lâchait le poste de chef d’état-major de la Minusca, la force des Nations unies déployée dans le pays. Jusqu’à se résigner au retrait des derniers militaires présents. « La France a considéré que les conditions n’étaient plus réunies pour que nous continuions à travailler au profit des forces armées centrafricaines », expliquait à l’AFP le général François-Xavier Mabin, à la tête de la mission centrafricaine.

Même enchaînement, même éviction au Mali, à quelques mois d’intervalle. Dans ce pays, où des milliers de soldats français étaient déployés depuis 2013, les tensions avec la junte militaire qui a pris le pouvoir en août 2020 se sont rapidement multipliées, sur fond de négociations entre Bamako et Moscou et de crainte d’une réédition du scénario centrafricain. L’arrivée des premiers paramilitaires russes dans le pays, en décembre 2021, actait la rupture. Poussé vers la sortie par la junte et par une opinion publique malienne de plus en plus hostile à la présence française, Paris s’est résigné à retirer ses troupes. Nouveau traumatisme. De ces humiliations centrafricaines puis maliennes est née une obsession pour l’offensive russe au sud du Sahara, à l’image du « complexe de Fachoda », qui, pendant des décennies, a façonné la politique africaine de la France.

La longévité extraordinaire du syndrome de Fachoda

Fachoda, aujourd’hui Kodok, au Sud-Soudan, était à la fin du XIXe siècle un vieux poste militaire égyptien situé sur les rives du Nil blanc, dans une région convoitée par les puissances impérialistes britannique, française, belge ou italienne. Le 10 juillet 1898, la colonne du capitaine Jean-Baptiste Marchand, partie de Brazzaville vingt mois plus tôt, y plantait le drapeau français et fortifiait la bourgade, rebaptisée Fort Saint-Louis. Elle fut bientôt rejointe par les troupes du général britannique Lord Kitchener, qui exigea le départ des Français au nom de la souveraineté égyptienne sur les boucles du Nil.

Les deux contingents expéditionnaires se sont fait face pendant trois mois, jusqu’à ce que Paris cède à la pression britannique et donne l’ordre d’évacuation. Marchand et ses hommes quittèrent la place sans combattre. Ce retrait, symbole de l’impuissance française, fut vécu par l’armée et les milieux nationalistes hexagonaux comme une terrible humiliation. Le « complexe de Fachoda » était né, qui prête à la « perfide Albion » – et par extension à l’ensemble du monde anglo-saxon – la volonté de saper, en tous lieux, l’influence française.

Le 20 novembre 1898, Le Petit journal, un quotidien parisien, consacre sa une à la défaite de Fachoda.
© Gallica.bnf.fr / BnF

Le syndrome a connu une longévité extraordinaire, irriguant l’analyse stratégique française tout au long du XXe siècle. François Mitterrand en était, par exemple, profondément imprégné. En mars 1957, alors en déplacement au Ghana en tant que garde des Sceaux, il expliquait déjà au journaliste Russell Warren Howe que « tous les ennuis que [la France a eus] en Afrique occidentale française n’ont rien à voir avec un désir d’indépendance, mais avec une rivalité entre les blocs français et britannique. Ce sont des agents britanniques qui ont fomenté tous nos ennuis »2. Trente-trois ans plus tard, devenu président de la République, il restait obsédé par les visées anglo-saxonnes sur le « pré carré » françafricain.

L’historien Jean-Pierre Chrétien explique ainsi que la valeur géopolitique du petit Rwanda tenait notamment, aux yeux de Paris, « à sa position sur une sorte de ligne de front face à l’Est africain anglophone ». À « l’arithmétique ethnique », qui structurait la grille de lecture française, s’est superposée « la thèse délirante d’un complot ougandais fédérant les ambitions d’un “empire tutsi” et d’une expansion anglo-saxonne »3, avec les conséquences que l’on sait sur l’engagement français aux côtés du régime de Juvénal Habyarimana et, par la suite, la proximité de Paris avec les instigateurs du génocide des Tutsis du Rwanda.

L’épouvantail russe

« Le syndrome de Fachoda est encore une réalité chez certains militaires ayant fait leur carrière en Afrique, rappelle le politologue Etienne Smith. En résumé, le génocide ne serait que le produit d’un complot anglo-saxon visant les richesses du Kivu et cherchant à déloger la France de ses positions en Afrique centrale. Des commanditaires cachés et puissants auraient agi dans l’ombre.4 » Lire les événements rwandais au prisme d’un vaste complot anglo-saxon devait nécessairement conduire à la catastrophe. Comme lire aujourd’hui les difficultés rencontrées par la France en Afrique au seul prisme des ambitions russes pourrait conduire à des choix diplomatiques et militaires malheureux.

Il n’est pas question de nier ou de minimiser la stratégie d’influence de la Russie, ni les violations des droits humains dont se rendent coupables les mercenaires du groupe Wagner déployés en Centrafrique, au Soudan ou au Mali5. Moscou y poursuit clairement des objectifs de « désenclavement politique » et d’affaiblissement de la puissance française – et plus largement occidentale – tout en mettant en scène son « grand retour » africain, qui nourrit le discours interne sur la restauration de la puissance russe6.

La Russie a signé des accords de coopération militaire avec une vingtaine de pays africains et a réalisé une véritable percée sur le marché des ventes d’armes du continent pour se hisser à la première place, devant la France et les États-Unis, sur le podium des principaux exportateurs. Les médias d’État russes comme Russia Today (RT) ou Sputnik, en langues française, anglaise et portugaise, se sont imposés comme des sources à large audience dans de nombreux pays et bénéficient de centaines de « relais informationnels » (agrégateurs de contenus, sites généralistes ou militants, pages Facebook, etc.)7. L’action des « entreprises d’influence » des oligarques proches du Kremlin, dont les « usines à trolls » d’Evgueni Prigojine, le dirigeant du groupe Wagner, ou le financement de médias locaux susceptibles de relayer les messages anti-occidentaux sont aujourd’hui bien documentés par les chercheurs ou les journalistes.

L’impossible introspection

Le problème n’est donc pas la réalité des ambitions russes, mais la façon d’y répondre et ce que cette réponse induit. Or le « complexe de Bangui », qui imprègne aujourd’hui les élites françaises, balaye tout questionnement sur la politique africaine de la France. Il enferme Paris dans la défense aveugle d’une « citadelle assiégée », au risque de graves compromissions.

La première conséquence, immédiatement perceptible, est donc un total renoncement à interroger les errements de la politique française en Afrique – anciens ou contemporains. Le discours officiel perd tout discernement, obsédé jusqu’à la caricature par l’ingérence russe. Ce que nombre d’observateurs appellent « sentiment antifrançais » ne serait que « miasmes du passé » ravivés par Moscou, qui veut « abîmer la France », « faire douter », mais « surtout aller chercher des intérêts » et servir « un projet de prédation », pour reprendre les mots du président Emmanuel Macron. Pour les pouvoirs publics français, le rejet de la présence française n’est « que la résultante d’actions de désinformation, de contrevérités, de propagande et de manipulation »8. Le tout virant au plus total mépris lorsqu’un ambassadeur de France ironise sur le plateau d’une télévision ivoirienne, en réaction aux manifestations bloquant un convoi de la force Barkhane au Burkina Faso : « Il suffit parfois d’un sandwich ou d’un Coca-Cola et vous avez 2 000 manifestants dans la rue ». C’est bien connu : les Africains sont si faciles à manipuler…

Les quelques éclairs de lucidité – « le sentiment antifrançais peut exister, j’en ai bien conscience », a admis la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Catherine Colonna, dans un entretien au journal ivoirien Fraternité Matin – sont immédiatement minimisés – « il ne faut pas penser que c’est spontané » – pour finalement désigner les vrais coupables : des influenceurs au service de la Russie qui « manipulent les réseaux sociaux, créent des faux comptes, diffusent de fausses informations » et « trompent la population ».

Un rejet aux causes multiples

Les médias se sont emparés du sujet sans beaucoup plus de discernement, comme en témoigne la façon dont ont été récemment traitées les tensions croissantes entre Paris et Ouagadougou, et finalement la demande de retrait des forces spéciales françaises stationnées dans ce pays. La presse a longuement spéculé sur le voyage du Premier ministre burkinabè à Moscou, en décembre 2022, ou sur la manipulation des récentes manifestations « antifrançaises » par la Russie. Si le Kremlin ne s’est pas privé de mettre de l’huile sur le feu, rares sont les médias qui ont rappelé combien était encore vive la mémoire du soutien hexagonal au président Blaise Compaoré et comment ce dernier avait été exfiltré par l’armée française, tant décriée aujourd’hui, lorsque la population s’est soulevée contre lui – c’était en octobre 2014, il y a moins de dix ans !

Cette grille de lecture des événements, qui écrase toute autre analyse, a le mérite de la simplicité. Elle évite d’interroger les causes profondes du rejet de la France et de prendre la mesure de son ancrage populaire. En ce sens, le « complexe de Bangui » n’est pas un simple prolongement des discours sur la « Chinafrique » ou sur les ambitions turques au sud du Sahara. Il s’accompagne d’une injonction à choisir son camp. Les mouvements qui, en France ou en Afrique, interrogent l’action de la France, feraient nécessairement preuve de naïveté, voire de complaisance, quand ils ne seraient pas de simples relais des manipulations russes.

C’est oublier un peu vite que ce « sentiment antifrançais » préexiste largement au retour des Russes sur la scène africaine. Les manifestations et les débats autour du franc CFA, pour ne prendre que cet exemple, sont bien antérieurs aux premières livraisons d’armes de la Russie à la République centrafricaine. Comme le rappelle l’anthropologue Jean-Pierre Olivier de Sardan, les raisons du rejet de la présence française sont multiples, qui reposent sur les faits attestés d’un lourd passif de la France sur le continent.

Les narratifs complotistes et conservateurs prospèrent sur ce socle de ressentiments. Quelques régimes alliés à Moscou l’instrumentalisent pour légitimer leur maintien au pouvoir. La propagande de Moscou s’en nourrit et l’alimente en retour. Mais elle ne l’a pas enfanté. Et la vague d’opposition à la présence française ne pourra être contenue simplement au moyen d’une contre-offensive communicationnelle ou par la mise en scène d’une relation présidentielle privilégiée avec la jeunesse ou les « sociétés civiles » africaines.

Une nouvelle rente à l’endiguement

Le « complexe de Bangui » risque surtout d’avoir comme conséquence l’instauration d’une nouvelle rente, à l’endiguement cette fois, comme il existe une rente sécuritaire et une rente migratoire pour les pays engagés dans la lutte contre le djihadisme au Sahel ou qui coopèrent en matière de lutte contre l’immigration. En d’autres termes, les régimes les moins recommandables peuvent aujourd’hui compter sur le soutien de Paris en prenant simplement leurs distances avec Moscou ou en instrumentalisant l’épouvantail russe. Il aura par exemple suffi que l’accord de coopération militaire entre Yaoundé et Moscou soit renouvelé en avril 2022 – de ce que l’on en connaît, sa portée est très limitée – et d’un refus du Cameroun de prendre part au vote des résolutions onusiennes sur la guerre en Ukraine pour que Christophe Bigot, directeur Afrique du Quai d’Orsay, se précipite dans la capitale camerounaise, et qu’il y soit suivi, quelques mois plus tard, par Emmanuel Macron.

Ce dernier s’était pourtant bien gardé, jusque-là, de rendre visite à son homologue camerounais, Paul Biya, vieil autocrate de 90 ans, qui ne semble pas décidé à lâcher le pouvoir qu’il détient depuis plus de quarante ans. Paradoxalement, le jeu diplomatique russe aura réussi, en quelques semaines, à réchauffer les relations franco-camerounaises, bien en froid ces dernières années.

Emmanuel Macron reçu par Paul Biya le 26 juillet 2022, à Yaoundé.
© Ghislain Mariette/ Présidence de la République

Emmanuel Macron avait pourtant proclamé sa volonté de rompre avec les vieux démons françafricains. Devant les étudiantes de l’université de Ouagadougou, en novembre 2017, le président français, qui entamait son premier quinquennat, revendiquait « d’être aux côtés de ceux qui travaillent au quotidien à rendre la démocratie et l’État de droit irréversible ». Il ne cachait pas son attirance pour les États « émergents » de l’Afrique anglophone, visitant le Ghana, le Nigeria, l’Éthiopie, le Kenya, le Rwanda ou l’Afrique du Sud plutôt que le Gabon ou le Congo-Brazzaville. Emmanuel Macron rechignait à s’afficher avec les vieux dictateurs du « pré carré », négligeant même de féliciter le Congolais Denis Sassou-Nguesso pour sa « réélection » en 2021.

Les ambitions de rupture ont fait long feu. L’heure est aujourd’hui à la normalisation et au recentrage sur la citadelle du « pré carré » traditionnel pour contenir l’offensive russe. Le voyage au Cameroun en témoigne, comme la réception à l’Élysée des présidents gabonais, en novembre 2022, et congolais, un mois plus tard. La famille du premier est au pouvoir depuis cinquante-cinq ans ; le second a passé trente-huit ans à la tête du pays. Christophe Bigot a fait le déplacement à Libreville en fin d’année et Emmanuel Macron devrait s’y rendre à son tour en mars 2023 pour le « One Forest Summit », avant de poursuivre son voyage à Brazzaville. À quelques mois de l’élection présidentielle gabonaise, ce déplacement sera forcément interprété comme une marque de soutien au futur candidat Ali Bongo.

La boussole du « pré carré »

Le Tchad, grand partenaire de Paris dans ses opérations militaires au Sahel, a été un des principaux bénéficiaires de la rente sécuritaire, sur le plan militaire et financier. Voisin d’un Soudan et d’une Centrafrique alliés de Moscou – sans oublier la présence de Wagner en Libye –, il saura naturellement tirer profit de cette nouvelle rente à l’endiguement. La présence d’Emmanuel Macron aux obsèques d’Idriss Déby Itno, mort en avril 2021 dans des affrontements dans le nord du pays, était déjà apparue comme un adoubement du fils, Mahamat Idriss Déby, à la tête d’une transition dynastique et anticonstitutionnelle. La France n’a guère élevé la voix lorsque la durée de la transition a été prolongée de deux ans, en octobre 2022. Elle a surtout fait preuve d’une grande retenue dans sa condamnation de la sanglante répression des manifestations de l’opposition tchadienne du 20 octobre 2022 – des dizaines de morts, des centaines de blessés et des milliers d’arrestations – témoignant une fois de plus d’une diplomatie très sélective en matière de démocratie et de droits humains.

Le Quai d’Orsay a officiellement condamné « les violences inadmissibles », en appelant à ce qu’elles cessent « d’où qu’elle[s] vienne[nt] » [sic], sans jamais nommer explicitement le gouvernement de transition. Paris s’est surtout préoccupé, dans les heures suivant le massacre, de démentir les « fausses informations » d’une « prétendue implication de la France » dans ces événements. Depuis, plus rien.

Les défenseurs des droits humains ont donc quelques raisons de s’inquiéter d’un « complexe de Bangui » qui servirait de nouvelle boussole à la diplomatie française, marginalisant toute voix critique de la politique africaine hexagonale et renouant avec les vieilles alliances françafricaines. La diplomatie du « double standard » en matière de démocratie est pourtant un puissant carburant au développement du « sentiment antifrançais », qui n’est sans doute pas près de refluer.

1Marie-Capucine Vauzanges, Le monument OPEX et la mémoire de la 4e génération du feu, Irsem, coll. « Etude », 1978, janvier 2021.

2Traduction par Michel Brot d’un extrait de l’ouvrage de Russell Warren Howe, Black Srar Rising. A Journey Through West Africa In Transition, Londres, Herbert Jenkins, 1958, dans « Mitterrand et l’Afrique en 1957 : une interview révélatrice », Politique africaine, n° 58, 1995, p. 52-53.

3Jean-Pierre Chrétien, « France et Rwanda : le cercle vicieux », Politique africaine, n° 113, 2009, p. 128-129.

4Etienne Smith, « Les derniers défenseurs de l’empire : quand l’armée française raconte ses Rwanda », Les Temps Modernes, n°680-681, 2014, p. 93.

5Voir notamment le rapport de la Minusca et de la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies ; le rapport du Groupe d’experts des Nations unies sur les mercenaires ; ou encore Sergey Sukhankin, Sociétés militaires privées russes en Afrique subsaharienne. Atouts, limites, conséquences, Notes de l’Ifri n°120, septembre 2020.

6Arnaud Kalika, Le “grand retour” de la Russie en Afrique ?, Notes de l’Ifri n°114, avril 2019.

7Maxime Audinet, Le lion, l’ours et les hyènes. Acteurs, pratiques et récits de l’influence informationnelle russe en Afrique subsaharienne francophone, Études de l’IRSEM n° 83, juillet 2021.

8Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, sur France 24, 11 décembre 2022.