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En Afrique, la guerre des drones (1/5)

L’Afrique, un nouveau champ de bataille dans le ciel

La très grande majorité des pays d’Afrique a acquis des drones de surveillance et de combat. Des groupes armés recourent également de plus en plus à cette technologie. Formations succinctes, mauvaise interprétation des cibles, contraintes juridiques fluctuantes... La prolifération de ces aéronefs bon marché et pilotés à distance fait-elle courir un risque en matière de droits humains ?

L'image montre un drone de surveillance, typiquement de type militaire, stationné sur une piste d'atterrissage. La scène est nocturne, éclairée principalement par des lumières artificielles qui révèlent les contours du drone. Le drone a une forme allongée et est équipé d'une hélice à l'arrière. Il repose sur un châssis avec des supports, et il y a des lumières au sol qui peuvent délimiter la zone ou indiquer l'emplacement. L'ambiance est sérieuse et technologique, évoquant des missions de surveillance ou de reconnaissance.
Un drone états-unien Reaper MQ-9 (avril 2014).
© US Air Force

L’Afrique est le nouveau champ de bataille de la guerre des drones. L’Ukraine et le Moyen-Orient dominent la couverture médiatique de l’utilisation de ces appareils, mais l’explosion de ce marché sur le continent pour la surveillance, l’attaque et l’alerte précoce révolutionne la façon dont les États africains choisissent de gérer leurs priorités en matière de sécurité. Presque tous les pays et de nombreuses insurrections utilisent des drones. Rien qu’en mars 2024, vingt-quatre États ont choisi d’acquérir des drones pour équiper leurs forces militaires, depuis les États nord-africains (Maroc, Algérie, Tunisie, Égypte, Libye) en passant par le Sahel (Sénégal, Soudan...), la Corne de l’Afrique, l’Afrique de l’Est (Kenya, Rwanda…), le golfe de Guinée et l’Afrique australe… .

Les Véhicules aériens de combat sans pilote (AUAV, son acronyme en anglais), provenant principalement de Turquie et de Chine (et dans une moindre mesure d’Iran et des Émirats arabes unis), fournissent aux pays africains des plates-formes de frappe et de surveillance à distance. Ces mêmes États qui font appel à ces nouveaux partenaires en matière de sécurité maintiennent leurs liens avec les fournisseurs de drones non armés tels que les membres de l’Union européenne (dont la France) et les États-Unis.

Les grands gagnants de la compétition pour la vente de drones armés sont la Turquie et la Chine. Ces deux États entendent s’assurer une position dominante grâce à la vente d’appareils tels que le CH-3, le TB2 et l’AUAV Wing Loong1. L’augmentation des achats de drones, associée à la décision des États africains de les utiliser dans le cadre de campagnes anti-insurrectionnelles, fait craindre des violations des droits humains, le renforcement du pouvoir gouvernemental incarné par un État de surveillance et des attentes irréalistes à l’égard de ces plates-formes.

Changer le cours d’une guerre

Le Nigeria a le plus long palmarès de tentatives de sécurisation de son territoire par des drones, en commençant par des appareils de surveillance de fabrication israélienne en 2006, puis en passant à des drones armés en 2014 avec la livraison des appareils chinois CH-3. De son côté, Abuja a travaillé à la création de drones et dévoilé en 2013 le Gulma, puis le Tsaigumi, et un drone armé toujours non livré, l’Ichoku, qui pourrait être utilisé pour la surveillance et des attaques de précision contre Boko Haram. Le Tsaigumi pourrait entrer en production en 2024 mais l’effort national de recherche et de développement (avec l’aide du Pakistan) semble s’être arrêté : la facilité et le faible coût d’acquisition de drones auprès de la Chine et de la Turquie constituent un argument convaincant pour ne pas le poursuivre. La menace de Boko Haram et de l’État islamique en Afrique de l’Ouest exigeait une réponse politique urgente, de sorte que l’armée de l’air nigériane s’est d’abord adressée à la Chine. Dès 2016, le CH-3 était utilisé contre les insurgés djihadistes. L’armée de l’air nigériane exploitera également des drones TB2 turcs dans le cadre de sa flotte aérienne multinationale.

Les fournisseurs chinois de CH-3 et CH-4B, moins sophistiqués que les modèles occidentaux armés, n’imposent pas au Nigeria les mêmes contraintes en matière de droits humains que les fournisseurs occidentaux de drones. Abuja a développé sa capacité à soutenir cette activité avec de nouveaux aérodromes, un escadron de drones, des formations de pilotes et l’acquisition du TB-2 turc et du Wing Loong chinois, une copie dérivée du drone américain Predator. Ces AUAV n’étaient pas et ne sont pas les meilleurs, mais ils sont suffisamment bons et ils s’améliorent. La Turquie et la Chine ont toutes deux compris que les drones à faible coût d’acquisition, aux frais généraux de maintenance modestes et aux munitions abondantes ont la capacité de changer le cours des campagnes de sécurité intérieure.

Pilotes nigérians de drones chinois CH-3 tout juste diplomés (mars 2018).
Pilotes nigérians de drones chinois CH-3 tout juste diplomés (mars 2018).
© Nigerian Air Force

Le Nigeria achète toujours des drones de surveillance à d’autres fournisseurs – la France et les États-Unis –, mais les munitions qu’il largue sur l’État islamique en Afrique de l’Ouest, sur Boko Haram et sur les bandits sont turques ou chinoises. Pour autant, le Nigeria n’est pas passé à une armée de l’air dominée par les drones, mais il les a adoptés comme élément clé de son programme d’acquisition hybride de drones et d’aéronefs plus traditionnels. L’armée de l’air nigériane modernise également ses hélicoptères avec des AH-1Z américains et des T-129 turcs, dans le cadre d’une stratégie de puissance aérienne à plusieurs niveaux pour la lutte contre le terrorisme et la modernisation des plates-formes à partir d’anciens appareils soviétiques tels que le Mi-24. La réalité opérationnelle reste que les drones sont moins coûteux que les hélicoptères ou les avions, plus faciles à entretenir, et ils ne mettent pas les pilotes en danger.

Drones iraniens malgré les sanctions

Qu’il s’agisse d’une politique exercée au nom de la défense nationale et de la souveraineté ou d’une prise de conscience que des technologies innovantes sont nécessaires pour lutter efficacement contre les menaces à la sécurité intérieure sur de grandes distances, d’autres États du golfe de Guinée et du Sahel se procurent des drones. Le Togo et le Burkina Faso ont acquis des drones TB-2 et les utilisent contre les djihadistes ; les forces armées soudanaises utilisent des drones kamikazes exploités par des alliés ukrainiens pour mener la guerre contre les forces paramilitaires de soutien rapide (FSR, issues des milices janjawids) et la société militaire privée Wagner2 ; le Tchad a opté pour des drones turcs Anka-S, et il semble que ce ne soit qu’une question de temps avant qu’ils soient déployés le long de la frontière nord avec la Libye ou en face du Nigeria, dans le bassin du lac Tchad ; la Mauritanie a acquis des drones armés CH-4 de fabrication chinoise mis à disposition de l’organisation régionale de sécurité du G5 Sahel. Cette acquisition permet à la Mauritanie de rejoindre les autres membres du G5 Sahel, notamment le Burkina Faso et le Tchad, ainsi que le Sénégal, qui utilisent des drones de surveillance de fabrication israélienne.

La Libye est un autre champ de bataille où les drones et la guerre par procuration s’entremêlent dans une guerre de factions concurrentes avec un grand nombre d’acteurs internationaux identiques. Les mercenaires de Wagner y utilisent des drones pour la reconnaissance et l’attaque, tout comme les Émirats arabes unis et l’Otan, qui s’appuient sur des drones turcs. Les types et les capacités des appareils présents en Libye doivent être observés de près car les implications pour les futures guerres urbaines sont significatives. Le recours à des drones dotés d’une intelligence artificielle, par exemple, pose un problème immédiat en ce qui concerne les lignes rouges des cibles militaires légitimes et les violations de la convention de Genève.

L’avenir de la guerre des drones en Afrique restera probablement à l’intérieur de frontières nationales et contre un ennemi interne. L’Éthiopie a réagi à une crise nationale en acquérant et en utilisant rapidement plusieurs types de drones contre les rebelles des forces de défense du Tigray pourmettre fin à leur tentative d’attaque contre Addis-Abeba. L’organisation pacifiste néerlandaise Pax a été en première ligne pour suivre la prolifération des drones et affirme que le gouvernement éthiopien, au début du conflit du Tigray, fin 2020, a reçu des livraisons de drones et des pilotes de Turquie, des Émirats arabes unis, de Chine et d’Iran, ce dernier étant un important fabricant et exportateur de drones, notamment vers la Russie. Le gouvernement iranien a été en mesure de fournir rapidement des aéronefs et, malgré les sanctions américaines découlant de la fourniture de drones à la Russie, Téhéran a envoyé des drones à l’Éthiopie et au Soudan sans se soucier des conséquences. L’Éthiopie n’est pas le seul État à bénéficier des drones iraniens : en janvier 2024, le Soudan aurait utilisé ces appareils contre les FSR.

Aéronefs « made in Africa »

Bien que les acteurs extérieurs et les fournisseurs non africains aient fourni la grande majorité des drones armés et non armés aux pays du continent, deux fabricants africains s’efforcent de prendre une partie du marché – à l’exception du drone tactique nigérian. C’est le cas du Maroc, qui maintient une surveillance accrue de l’Algérie, considérée comme une menace pour sa sécurité. Pour autant, Rabah n’a pas cessé ses efforts pour diversifier son inventaire : il est confirmé qu’il a acquis des drones suicides chinois Wing Loong 2, turcs Akinci et israéliens SpyX à la fin de l’année 2023. D’autres achats de drones TB-2 à la Turquie et de drones de reconnaissance Heron à Israël permettront sans doute au royaume de disposer d’une force diversifiée pour opérer aux côtés de sa grande flotte d’avions conventionnels, une ligne de conduite prudente pendant qu’il développe ses propres capacités de fabrication.

À l’autre extrémité du continent, l’Afrique du Sud a une longue expérience de la conception et de la fabrication de drones qui remonte aux années 1970. Mais la plupart des appareils qu’elle utilise sont destinés à la surveillance. Le drone sud-africain le plus récent, le Milkor 380, est un aéronef autonome qui a l’apparence et le profil opérationnel du Predator ou du Wing Loong. Le développement et le déploiement potentiel de drones dotés de capacités similaires à celles du drone états-unien ou du Wing Loong chinois illustrent une évolution dans l’emploi de drones armés alors que jusque-là les drones étaient utilisés principalement pour des missions de surveillance.

L’analyse des raisons qui poussent ces États à utiliser des drones plutôt que des avions avec équipage ou des avions exploités par des sociétés militaires privées sous contrat permet d’entrevoir comment, à l’avenir, ces aéronefs seront davantage présents dans un plus grand nombre de conflits africains. Au fur et à mesure que les pays qui opèrent au sein des blocs régionaux africains tirent des enseignements et les partagent, l’utilisation de ces appareils devrait évoluer. Il est possible, voire envisageable, que l’Union africaine (UA) se dote aussi d’une capacité ou coopte les capacités de ses États membres.

Al-Chabab et Isis à pied d’œuvre

Le risque d’une course aux armements à travers l’acquisition de drones augmente fortement en raison de nombreux facteurs, dont le coût et la disponibilité des fournisseurs potentiels ne sont pas les moindres. Certains États ont largement communiqué sur leurs achats jusqu’à célébrer leur arrivée – le Burkina Faso, le Nigeria et le Maroc ont ouvertement révélé leurs acquisitions. Le Soudan et l’Éthiopie se sont montrés moins transparents (ces deux pays ont reçu plusieurs types de drones provenant de plusieurs sources, dont l’Iran, la Chine et la Turquie).

Certains observateurs ont soulevé la question du risque encouru par les États si un groupe armé acquerrait des capacités du même niveau que ces drones TB2 ou CH-3 en les capturant aux forces gouvernementales ou en recevant des drones suicides d’un fournisseur tiers. Cela a déjà été le cas avec l’utilisation récente de drones par la milice houthiste contre des navires dans le golfe d’Aden, à l’aide de drones clones d’appareils iraniens Ababil, qui sont désormais assemblés au niveau national avec des pièces iraniennes et houthistes. De l’autre côté de la mer Rouge, en Somalie, un autre groupe reçoit une aide iranienne, Al-Chabab, qui peut également s’appuyer sur l’expérience de l’État islamique en Irak et en Syrie (Isis) en matière de drones quadrirotors.

Al-Chabab et les affiliés d’Isis ont démontré leur capacité à adapter leurs tactiques et leurs techniques à des environnements opérationnels changeants. Al-Chabab a des connexions internationales et pourrait acquérir des drones quadrirotors civils non armés pour les transformer en drones armés s’ils le jugent nécessaire pour leurs opérations, alors qu’ils utilisent déjà des drones pour la surveillance. D’autres drones plus performants pourraient être capturés auprès d’agences gouvernementales, comme les drones volés dans des entrepôts sécurisés du gouvernement somalien en 2022 ou le drone ScanEagle, de fabrication états-unienne, qu’Al-Chabab a exhibé et qui pourrait avoir été volé à une source militaire. Certaines applications tactiques nécessitent moins de puissance cinétique et plus de furtivité, et les terroristes ou les insurgés pourraient facilement se tourner vers des drones commerciaux.

Contre-offensive électronique

En mai 2022, au Mozambique, le ministre de l’Intérieur a affirmé qu’Isis y utilisait de petits drones rapides pour espionner et cibler les forces gouvernementales. Ce groupe a déclaré avoir capturé un drone gouvernemental lors d’une attaque contre un de ses convois. L’armée nigériane affirme également que Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest utilisent des drones commerciaux à quadrirotor pour créer des vidéos de propagande, mener des opérations de reconnaissance et guider des tirs indirects contre les forces gouvernementales. Des drones de livraison seraient par ailleurs à l’étude pour acheminer des charges explosives.

La course à l’armement en matière de drones est actuellement en faveur des forces gouvernementales, mais cette avance pourrait s’effriter face à la résurgence d’actions terroristes ou insurrectionnelles dans des régions allant du Sahel à la Corne de l’Afrique si les terroristes se procuraient des dispositifs capables de bloquer les signaux de commande des drones ou s’ils obtenaient eux-mêmes des drones armés.

En parallèle se joue une autre course liée aux moyens de dégrader les performances des drones et des méthodes pour aveugler leurs capteurs. Au Mozambique, des sous-traitants ont réussi à abattre des drones d’Isis-Mozambique à l’aide d’un dispositif de guerre électronique monté sur un sac à dos. De nombreux États africains disposent de capacités de guerre électronique, ou du moins prétendent en disposer. Cependant, comme en Ukraine, il est difficile de contrer les drones même avec des capacités électroniques, des missiles et des canons antiaériens. La méthode la plus efficace semble être un système d’alerte précoce et des protocoles de réponse.

La frappe chimique, un scénario terrifiant

La plupart des États africains ne sont pas préparés à affronter un adversaire capable d’utiliser des drones, ce qu’ils ont reconnu à la fin de l’année 2023 lors d’une conférence, au Sénégal, des chefs d’état-major de l’armée de l’air africaine. Un responsable militaire nigérian a récemment admis qu’il ne disposait pas de contre-mesures contre les drones, malgré l’avancement de son pays dans l’utilisation de ces aéronefs. En Libye et au Soudan, des forces opposées, ayant le même degré de capacité offensive, sont frappées et ripostent par vagues : celles-ci semblent fluctuer en fonction de l’approvisionnement en drones et de leur efficacité. Malgré la prétendue précision des attaques de drones par rapport aux munitions conventionnelles, de nombreuses personnes non armées sont blessées ou tuées.

L’utilisation de drones pourrait aussi se développer dans le domaine maritime. Certains États ont choisi de s’en servir pour observer les migrations animales ou surveiller le changement climatique. D’autres ont acquis des drones armés afin d’être prêts à frapper les menaces offshore, comme au large du golfe de Guinée, contre la piraterie. Toutefois, les mêmes problèmes sur terre s’appliquent en mer. Une frappe mal informée contre des menaces maritimes supposées pourrait créer un incident international. En outre, si un drone était utilisé pour lutter contre la piraterie, comment le droit international déterminerait-il les objectifs militaires légitimes ?

La menace que font peser les insurrections et les mouvements de guérilla en Afrique et dans le monde ne va pas diminuer. Et l’éventualité d’une attaque chimique ou biologique lancée par un drone est une réalité terrifiante. Les réservoirs de stockage de produits chimiques ou les installations industrielles sont des cibles de choix. Tout aussi terrifiante est la possibilité qu’une cible soit frappée opportunément pour créer un incident dramatique : bas et lent, difficile à voir la nuit et difficile à contrer pour de nombreux États africains, un drone transportant une petite charge utile dans une ville surpeuplée pourrait provoquer une catastrophe. Le risque que des groupes armés détournent des drones civils pour attaquer les forces gouvernementales ou les populations est de plus en plus préoccupant car l’accès à ces appareils n’est pas entravé par des restrictions juridiques ou autres.

Furtifs, hors d’atteinte et presque invulnérables à la plupart des attaques, les drones offrent aux gouvernements l’outil idéal et peu coûteux pour combattre les groupes armés sur de vastes étendues. Le Togo a acquis un drone TB-2 de moyenne altitude et de longue endurance pour 5 millions de dollars, quand le Nigeria a payé un hélicoptère d’attaque T-129 pour environ 45 millions de dollars. De plus, les opérateurs de drones ne meurent pas lorsque leur appareil s’écrase.

Pertes civiles et ressentiment

Le renseignement et l’interprétation sont particulièrement importants pour la surveillance aérienne ainsi que pour les missions d’attaque contre des ennemis présumés. Or l’interprétation au sol par un opérateur, effectuée à partir d’un drone lancé à très haute altitude, peut ne pas être la même qu’un agent sur le terrain. Le risque de ressentiment et de colère de la part des civils touchés par les frappes de drones rappelle constamment que les drones doivent être utilisés avec précision, faute de quoi ils peuvent servir de catalyseur aux groupes d’insurgés pour revendiquer une supériorité morale. La doctrine, tout comme les questions relatives aux droits humains, sont importantes et posent la question des ventes d’armes responsables et la nécessité d’une formation de haut niveau pour garantir un taux de mortalité civile aussi proche que possible de zéro.

Les États-Unis ont reconnu que les pertes civiles peuvent rapidement affecter la perception d’une action légitime et ont prévu d’inclure des stratégies de sensibilisation dans tous les cas où des alliés opéreraient aux côtés des forces états-uniennes. Cependant, la plupart des nouvelles puissances armées de drones ne s’entraînent pas sur des drones aux côtés des États-Unis, et les incidents tragiques se multiplient lorsque des drones sont utilisés dans le cadre d’opérations de maintien de la paix.

Les 88 victimes civiles, fin 2023, lors d’une frappe par erreur à Tudun Biri, au Nigeria, ont vraisemblablement été tuées par des militaires ayant suivi un entraînement formel. Les pilotes de drones nigérians bénéficient d’un programme de formation spécifique qui exige plus de 100 heures d’entraînement avant toute mission. Le manque de transparence concernant la formation des pilotes par d’autres forces militaires est alarmant, et le risque d’erreurs augmente lorsque les pilotes tentent d’utiliser leurs drones dans des conditions de faible éclairage et de dégradation des conditions météorologiques. De plus, en 2024, le Nigeria a commencé à proposer une formation aux civils souhaitant devenir pilotes d’avions radiocommandés, en suggérant que les mêmes étudiants participant au programme pourraient devenir pilotes de drones militaires. Les implications d’un tel programme « à double usage » sont importantes pour les civils et les militaires.

La manière dont les drones sont utilisés contre les menaces sera un enjeu plus fort que celui du nombre de drones acquis. Ils nécessitent des forces terrestres pour prendre et conserver un territoire, exploiter les revers de l’ennemi et protéger les bases de drones. On ne peut attendre des drones qu’ils résolvent les conflits internes fondés sur les inégalités ou les frictions politiques. Les drones ne peuvent pas être des diplomates ou des spécialistes des affaires civiles. Les drones sont des outils et doivent être considérés comme tels. Ils ne sont pas une panacée qui fera disparaître les conflits.

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1Il convient de noter que la Chine a imposé une restriction à l’exportation des drones civils et de leurs pièces détachées pour des raisons de sécurité.

2Renommée Africa Corps et désormais affiliée au ministère russe de la Défense.